En quoi consistent les tailles minimales de capture et les interdictions de pêche par espèce ?
- Les tailles minimales de capture sont un outil de gestion halieutique, qui permet de fixer les tailles minimales que doivent atteindre les poissons ou les invertébrés pour pouvoir être capturés.
- Les interdictions visent à empêcher la capture et l’embarquement d’espèces spécifiques.
Pourquoi imposer des tailles minimales de capture et interdire la pêche de certaines espèces ?
La fixation de tailles minimales de capture permet aux individus d’une même espèce d’atteindre une taille suffisante pour se reproduire au moins une fois avant d’être capturés. Les interdictions de pêche visent à protéger les espèces menacées, généralement sous l’effet de la surpêche.
À quelle période et dans quelles zones faut-il imposer ces mesures ?
Les services des pêches et les organismes compétents de la plupart des États et Territoires insulaires océaniens fixent des tailles minimales de capture pour un large éventail d’espèces de poissons pélagiques côtiers, de poissons de récif, d’holothuries, de bénitiers, de trocas, de burgaux, de crabes et de langoustes. Ces tailles minimales et interdictions doivent être rendues publiques, et les communautés et les pêcheurs professionnels doivent les respecter.
La façon de mesurer les spécimens peut varier d’un pays à l’autre. Les mesures de longueur standard sont présentées dans la figure ci-dessus pour différents groupes d’espèces marines. Dans le sens des aiguilles d’une montre, en partant de la gauche : longueur de la carapace (CL) d’une langouste ; longueur de la coquille (L) d’un bivalve ; et longueur totale (TL) ou longueur à la fourche (CFL) d’un poisson.
Les tailles minimales de capture et les autres règles applicables aux ressources côtières dans le Pacifique sont présentées de manière synthétique sur la page Web REEFLEX, hébergée par la CPS:
https://www.spc.int/CoastalFisheries/Legislation/
Pour certaines espèces, on fixe en outre une taille maximale de capture. La raison en est que les grands spécimens produisent bien plus d’œufs que les petits.
L’illustration ci-dessous montre un jeune poisson femelle. Lorsque la taille d’un poisson double (profondeur, largeur et longueur), son volume est multiplié par huit ; le nombre d’œufs que la femelle peut porter étant déterminé par son volume, il peut potentiellement être lui aussi multiplié par huit.
On peut également fixer des tailles maximales de capture lorsque les grands individus se vendent moins bien que les petits. Par exemple, les grandes coquilles de troca, souvent piquées en raison des attaques parasitaires subies par l’animal tout au long de sa vie, sont moins recherchées pour la fabrication des boutons en nacre.
Comment appliquer les tailles minimales de capture et les interdictions de pêche ?
Tailles minimales de capture
Si les services des pêches ou les organismes compétents adoptent des règlements halieutiques reposant sur des données scientifiques et des intentions louables, il est dans l’intérêt des communautés d’y apporter leur soutien. Les communautés devraient mener des actions de sensibilisation au niveau local pour expliquer pourquoi les limites et les interdictions sont nécessaires et contrôler les quantités pêchées par les habitants.
Interdictions de pêche
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Les communautés peuvent interdire la pêche de certaines espèces surpêchées ou jouant un rôle critique dans la santé des récifs. Par exemple, les perroquets empêchent les algues de proliférer sur les coraux, de les étouffer et de les tuer. Dans certaines communautés, l’introduction de torches sous-marines a permis aux pêcheurs de plonger la nuit pour chasser les perroquets dormant sous les formations coralliennes.
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En vertu de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), un système mondial de contrôles a été mis en place pour réglementer le commerce de certaines espèces marines en danger. Dans les États et Territoires insulaires océaniens, sont notamment visés toutes les espèces de bénitiers (Tridacna), les coraux, tous les requins, le napoléon (Cheilinus undulatus), et certaines espèces d’holothuries (holothurie noire à mamelles, Holothuria whitmaei, et holothurie blanche à mamelles, Holothuria fuscogilva).
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Les bénitiers vivent dans des eaux claires peu profondes, ce qui les rend particulièrement vulnérables, et certaines espèces ont disparu dans de nombreux pays de la région. Des actions de sensibilisation sont nécessaires pour que les pêcheurs sachent quelles espèces sont protégées.
Quels sont les avantages, les inconvénients et les limites propres aux tailles minimales de capture et aux interdictions de pêche ?
L’application de tailles minimales de capture et l’imposition d’interdictions de pêche pour les espèces menacées garantissent la croissance des populations des espèces visées et le maintien de l’offre de produits de la mer au niveau local.
Les tailles minimales doivent être faciles à mesurer
L’un des inconvénients des tailles minimales de capture réside dans la difficulté rencontrée par les communautés pour mesurer la taille des organismes marins pêchés et prélevés. Aux Fidji, la taille minimale de 3 cm a été fixée pour la capture des arches, ce qui permet aux pêcheurs de les mesurer à l’aide de leurs doigts.
La méthode de capture visée ne doit pas blesser les poissons ou invertébrés
Les tailles minimales de capture ne sont applicables que si la méthode de capture visée ne blesse pas les organismes pêchés ou prélevés. Il s’agit par exemple des mollusques ramassés manuellement ou des crustacés pris dans des casiers. Étant donné que les petites langoustes piquées au harpon ne survivent pas une fois relâchées, les pêcheurs sont passés maîtres dans l’art d’estimer la taille des individus, ce qui leur permet d’éviter de cibler les langoustes trop petites. Les poissons trop petits pris aux hameçons dans les eaux peu profondes ont des chances de survivre s’ils sont immédiatement remis à l’eau. En revanche, ce type de règle n’est pas indiqué pour les poissons tels que les vivaneaux profonds. La probabilité de survie d’un poisson relâché après avoir été remonté à la surface depuis les profondeurs est faible. À la remontée, la baisse de pression fait gonfler la vessie natatoire, qui maintient le poisson à la surface.
Non recommandé pour les poissons qui changent de sexe au cours de leur vie
Le cycle biologique des poissons de récif tropicaux peut aussi rendre difficile l’application de tailles minimales de capture. De nombreuses espèces récifales tropicales, comme les mérous et les empereurs, changent de sexe au cours de leur vie. Chez ces espèces, la fixation de tailles minimales de capture peut concentrer la pression de pêche sur les spécimens du même sexe. Si les poissons mâles deviennent femelles lorsqu’ils atteignent une certaine taille, les captures de poissons de taille supérieure à la taille réglementaire seront composées pour l’essentiel de femelles. Chez certaines espèces de mérous, par exemple, les poissons naissent mâles et deviennent femelles lorsqu’ils atteignent 3 kg. À l’inverse, d’autres espèces de mérous, comme la saumonée, deviennent mâles en grandissant. Pour ces espèces, les captures totales seront sans doute en grande partie constituées de mâles. Si l’on prélève trop de mâles, il se peut qu’ils ne soient plus présents en nombres suffisants pour féconder les œufs des femelles au cours de la ponte. Pour surmonter ces problèmes, il est possible de fixer des tailles maximales de capture pour certaines espèces.
Comment savoir si les tailles minimales de capture et les interdictions de pêche sont efficaces ?
Les communautés devraient conduire des enquêtes afin de savoir si les organismes marins pêchés et prélevés ont atteint la taille minimale de capture et ne sont pas interdits à la pêche. Si ces règles de pêche ne sont pas respectées, les membres des communautés, avec le soutien des chefs traditionnels, devraient prendre des mesures adaptées au contexte local pour sanctionner les contrevenants.
Quelles autres mesures de gestion peut-on adopter en complément ?
La protection des femelles ovigères est un autre moyen d’optimiser leur contribution à la génération suivante. Toutefois, ce type de règle ne peut être raisonnablement appliqué qu’aux espèces dont le sexe peut être facilement identifié par les pêcheurs et qui sont ciblées à l’aide de méthodes ne blessant pas les animaux capturés. Le sexe de la plupart des poissons ne peut pas être déterminé par examen externe. Dans ce cas, il peut être nécessaire d’envisager l’adoption d’autres règles, telles que les fermetures saisonnières durant la période de reproduction.
Fermetures saisonnières durant la période de reproduction
Chez la plupart des espèces de crustacés, les mâles se distinguent facilement des femelles, et il est possible d’imposer des règles rendant illicites la capture et l’embarquement des langoustes et des crabes ovigères.